La France reste ambiguë sur l'envoi de renforts en Afghanistan

02/12/2009 18:50

 

La France a réaffirmé son soutien à la stratégie de Barack Obama en Afghanistan mais temporise et maintient l'ambiguïté dès qu'il s'agit d'évoquer l'envoi éventuel de renforts militaires français dans ce pays.

 

Le président américain a annoncé mardi soir l'envoi par les Etats-Unis de 30.000 soldats de plus en Afghanistan et souhaité que ses alliés de la force internationale sous commandement de l'Otan, dont la France, renforcent également leur contingent.

Selon le quotidien Le Monde, Washington demanderait 1.500 soldats français de plus - chiffre non confirmé jusqu'ici par Paris et jugé fantaisiste par un diplomate de l'Otan.

"La demande est forte", a reconnu le chef de la diplomatie française, Bernard Kouchner, à l'issue du conseil des ministres.

Le conseiller spécial du président Nicolas Sarkozy, Henri Guaino, avait estimé auparavant sur France Inter que ça n'avait "pas de sens de dire d'emblée à tout 'non, non, non, jamais'".

Mais il a assuré qu'aucune décision n'avait été prise.

"Le président de la République a rappelé ce matin (en conseil des ministres) qu'il était important de se donner le temps de la réflexion sur ce sujet", a expliqué le porte-parole du gouvernement, Luc Chatel.

Luc Chatel et Henri Guaino ont réaffirmé que l'objectif de la France était d'abord "l'afghanisation", leitmotiv de Paris.

En octobre, Nicolas Sarkozy avait dit au Figaro que la France n'enverrait pas "un soldat de plus" en Afghanistan et qu'il fallait au contraire "davantage de soldats afghans".

L'Elysée et le ministre de la Défense, Hervé Morin, ont ainsi maintenu jusqu'au début de la semaine que Paris n'irait pas au-delà des 3.750 soldats français déjà engagés dans la Force internationale d'assistance à la sécurité (Isaf) - auxquels s'ajoutent 150 gendarmes et huit policiers.

Nicolas Sarkozy renvoie désormais toute décision sur un ajustement éventuel du dispositif français à la conférence de Londres sur l'Afghanistan, prévue le 28 janvier.

Il a salué dans un communiqué le "discours courageux, déterminé et lucide" de Barack Obama, qui "ouvre de nouvelles perspectives", et lui a apporté son "plein soutien".

PRIORITÉ À LA FORMATION DE L'ARMÉE AFGHANE

La France attend maintenant de la conférence de Londres des "engagements clairs des autorités afghanes (...) en matière de gouvernance, de développement économique et social et de lutte contre le trafic de drogue" et des "orientations précises sur l'afghanisation dans les zones les plus stables", ajoute-t-il.

C'est dans ce cadre que la France examinera sa contribution à la stratégie internationale, conclut-il, tout en réaffirmant sa "priorité à la formation des forces de sécurité afghane".

Le chef de la diplomatie a estimé qu'il n'y avait aucune nécessité pour le moment d'augmenter les effectifs français.

"Nous, dans notre zone, nous avons le nombre de soldats nécessaires", a-t-il dit après le conseil des ministres. "S'il faut ajuster, on le fera (...) Il y aura peut-être d'autres choses, il y aura peut-être de l'entraînement." Bernard Kouchner a aussi évoqué l'envoi éventuel de civils et de "techniciens".

Le secrétaire général de l'Otan, Anders Fogh Rasmussen, s'attend à ce que les alliés fournissent au moins 5.000 soldats supplémentaires, chiffre inférieur aux espoirs américains.

La gauche française clame pour sa part son opposition à l'envoi de renforts en Afghanistan, alors qu'un débat est prévu sur ce sujet à l'Assemblée nationale le 16 décembre.

Pour l'ex-Premier secrétaire du Parti socialiste François Hollande, Paris doit non seulement refuser d'envoyer des soldats supplémentaires mais aussi changer leur mission actuelle.

"Le risque de la décision d'Obama, c'est l'escalade, envoyer sans cesse plus de troupes pour maintenir un ordre de plus en plus précaire", a-t-il dit sur France 2.

Nicolas Sarkozy risque quant à lui de se retrouver lié par sa décision de faire reprendre à la France toute sa place dans le commandement intégré de l'Otan, a ajouté le député PS.

"Pour l'instant, Nicolas Sarkozy dit 'non, je n'enverrai que des formateurs'. Mais nous ne sommes pas certains qu'il ne sera pas lui-même, dans le cadre de cette alliance militaire, pris dans l'engrenage", a déclaré François Hollande.

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